Article de Sioux Berger (Source Facebook)
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« La planète est aux mains des lobbies de l’énergie, et j’en ai fait les frais » Témoignage de Renan Biro, propriétaire d’une huile de moteur….qui ne plaît pas aux lobbies !
Je suis né à Paris en 1952, et je suis un parisien pure souche. Rien ne me prédestinait à croiser la route des lobbies pétroliers américains. A part peut-être l’histoire de ma famille, et …ma passion pour les voitures anciennes.
Mes aïeux avaient fondé au début du XXème siècle une entreprise très utile, sur la base d’une invention tout aussi utile : la poudre extinctrice des extincteurs. J’ai donc évolué enfant, puis jeune adulte, dans cet univers de chimie et de mécanique. C’est donc tout naturellement que j’ai pris la suite de cette aventure familiale : peu à peu l’entreprise a grossi, nous avons également fabriqué les extincteurs en eux-mêmes, fourni les sapeurs pompiers de Paris, puis produit les camions anti-incendie pour les casernes et l’Armée de l’Air.
Mais dans les années 80, la concurrence commençait à s’installer, et ma famille a décidé de vendre notre petite affaire avant que nous ne soyons engloutis par un groupe plus important.
Comme je suis un peu entrepreneur dans l’âme, j’ai aussitôt relancé une société de publicité qui proposait aux artisans-commerçants des affichages sur des véhicules. Ma petite affaire marchait plutôt bien, et j’ai recherché un parking assez spacieux pour mon parc automobile. Et je suis alors tombé sur un lieu immense et tout neuf à Saint Ouen. Ce parking était absolument magnifique. Spacieux, aéré, parfaitement équipé, il pouvait accueillir jusqu’à 300 voitures. C’était plus qu’il ne m’en fallait. J’y ai entreposé mes propres voitures de collection, et puis je me suis dit que, si j’appréciais cet espace pour mes autos, je pouvais sans doute proposer ce nid douillet à d’autres passionnés, et allier l’utile à l’agréable : créer un hôtel de luxe pour l’automobile. J’allais l’appeler « L’Espace Amour ». A Paris, les clients ne manquent pas, et les garages sont rares ! Ils n’ont donc pas tardé à affluer. Ma promesse : laissez-nous votre Rolls ou votre Hispano, on vous la garde et on vous la bichonne. Seulement voilà…mes clients me laissaient leurs véhicules pendant des mois, et ne les faisaient jamais rouler. Or tout garagiste sait parfaitement ceci : qu’elle roule ou qu’elle ne roule pas, une voiture, ça s’abîme. Pourquoi ? Parce que le lubrifiant logé dans la mécanique s’acidifie dans le temps, et, au contact de l’oxygène de l’air, endommage le moteur. Pour en avoir le cœur net, j’avais fait faire une analyse de l’huile sur une Bugatti de 1923, et le verdict était sans appel. L’huile, quelle que soit la marque utilisée, abîmait le moteur en provoquant de l’acidité.
J’étais donc face à un problème de taille : comment protéger ces bijoux que l’on m’avait confiés ?
C’est en 1988, alors que je faisais un tour à la foire de Paris, que l’idée m’est apparue comme une évidence, tandis que je regardais une dame faire sauter une crêpe dans une poêle au revêtement « antiadhésif ». Si la poêle ne colle pas, c’est qu’il y a, entre le métal et l’huile, un revêtement qui stoppe l’acidité : le fameux Téflon de Dupont de Nemours.
Je devais donc trouver une solution pour ajouter dans l’huile du moteur une substance antiadhésive qui allait le protéger car malheureusement pour moi le Téflon n’est pas adapté pour les moteurs. C’est ce que j’ai conçu avec mon oncle Guy, en ajoutant une dose infinitésimale d’antiadhésif à de l’huile. Sans rien dire à mes clients, j’ai donc bichonné leurs voitures de luxe en ajoutant cette substance. Et les retours ont été incroyables : Un de mes riches locataires, qui avait l’habitude de faire le trajet Paris-Lyon en Rolls, est venu me voir en me disant qu’il n’avait pas eu besoin de faire le plein à Mâcon ! Un autre m’a expliqué qu’il montait d’habitude en seconde au sommet du mont Valérien, et qu’il avait passé allègrement la 4ème avec une facilité déconcertante. Le produit que nous avions mis au point dépassait donc toutes mes espérances : non seulement il permettait de protéger les moteurs, mais il semblait aussi les rendre plus économiques et surtout plus performants.
J’ai donc décidé de faire tester mon invention par des professionnels. Par le bouche à oreilles, j’ai rencontré un homme spécialisé dans l’entretien des bus de la RATP. Il a accepté de faire le test. Et il m’a rappelé quelques jours après, enthousiaste : grâce à mon produit, non seulement les moteurs tournaient mieux, mais on avait baissé de 75 % les émissions polluantes. Mon produit permettait donc de brûler le carburant en émettant pratiquement plus de rejets toxiques. J’ai donc déposé un brevet, et j’ai baptisé ma découverte « TECHNOLOGIE A9® ».
Il fallait que je passe à la vitesse supérieure ! Les politiques, les industriels, qui cherchaient désespérément une idée novatrice pour stopper la pollution n’allaient pas en revenir ! On allait m’accueillir à bras ouverts ! On allait me dérouler le tapis rouge ! Malheureusement, j’ai vite déchanté. Je me suis rendu au Ministère de l’Industrie et on m’a répondu :
« Ah ! Mais mon bon monsieur, des professeurs Tournesol, nous en recevons des centaines, et aucune poudre de perlimpinpin n’a réussi à résoudre ce problème d’usure des moteurs, et encore moins de pollution ! Si le produit magique existait, ça se saurait ! Mais vous pouvez toujours envoyer votre produit au laboratoire de contrôle de Montlhéry : l’UTAC. » Je ne me décourage pas, et j’envoie mes échantillons. Puis j’attends de longues semaines. Et voilà qu’on me rappelle. « Bravo », me dit-on, votre produit, c’est du jamais vu ! Une invention qui permet d’économiser la voiture et le carburant ! Une invention hautement écologique !
Fort de cette victoire et muni des documents d’attestation, je me rends donc au Ministère de l’Environnement, certain de mon succès. Et voilà ce qu’on m’a répondu :
« Ah ! Mais mon bon monsieur, des professeurs Tournesol, nous en recevons des centaines, et aucune poudre de perlimpinpin n’a réussi à résoudre ce problème d’usure des moteurs, et encore moins de pollution ! Si le produit magique existait, ça se saurait ! Mais vous pouvez toujours envoyer votre produit au laboratoire officiel européen situé à Bron : l’INRETS. »
Une homologation supplémentaire ? Qu’à cela ne tienne ! Je ne me décourage pas, et j’envoie mes échantillons. Puis j’attends de longues semaines. Et voilà qu’on me rappelle. « Bravo », me dit-on, votre produit, c’est du jamais vu ! Une invention qui permet d’économiser la voiture et le carburant ! Une invention hautement écologique !
Fort de ces différentes victoires, muni de mes attestations, je décide donc de donner une conférence de presse, et j’invite tout le gratin du pétrole. Je me vois déjà ovationné par Elf et Total ! Mais… ce n’est pas exactement comme cela que ça s’est passé. Voici ce qu’ils m’ont répondu :
« Nous, nous sommes des marchands de pétrole. Nous extrayons le produit de base, nous le raffinons et nous sous traitons à des sociétés spécialisées qu’on appelle « additiveurs » les ingrédients que l’on va introduire dans nos huiles de base. On ne peut rien vendre sans passer par eux. Ce sont eux qui dictent les normes internationales car de nos jours tout est normalisé. Il faut que vous passiez par eux.
Je ne me décourage pas, et je me rends à Dallas, le temple du pétrole. J’y rencontre ( ne riez pas) un certain JR, qui m’explique que mon produit est sans doute très bon, mais qu’il ne pourra pas l’utiliser.
« Nous faisons de la chimie soluble ».me répond JR. Nous labellisons donc des produits solubles. Votre produit n’est pas soluble. Il est miscible. Il faut l’ajouter à nos huiles. Nous ne vendons que nos produits. Et nos productions pétrochimiques sont toutes solubles. »
Miscible ou risible ? JR ne m’a pas interdit d’ajouter mon produit à leurs huiles, mais il n’a pas l’intention de m’aider à sauver la planète ni de prolonger la durée de vie du moteur de Monsieur Dupont, qui s’est endetté pour 10 ans avec l’achat de sa Twingo !
Je rentre en France déconfit, mais je ne me décourage toujours pas ! Je cherche un marchand d’huile, je lui propose de créer la première huile multigrade Filmogène normalisée qui contiendra la TECHNOLOGIE A9®. Et le bouche à oreille commence à fonctionner. L’essayer, c’est…économiser sa voiture et du carburant, alors forcément, je n’ai pas trop de mal à vendre mon produit ! Je démarche les grandes surfaces, et mon huile filmogène s’arrache. En 1993, je rentre dans le peloton de tête des huiliers en France. Même sans pub, même sans l’accord de JR, mon produit se vend et je deviens…gênant. La grande distribution commence à me demander des sommes colossales pour « les têtes de gondole », « les campagnes promotionnelles diverses ». Bref, ignorant des coutumes liées à la grande distribution , dont la loi silencieuse est « j’enrobe de billets de banque chaque bidon vendu », je dois donc payer mes dettes, et quitter le réseau.
Décidément, je dois faire cavalier seul.
Depuis, j’ai une petite PME qui fonctionne assez bien. Je vends ma technologie un peu partout dans le monde, mais …je ne peux pas m’implanter en France. Dans les couloirs des ministères, on m’a clairement répondu : « vendez votre technologie où vous voulez, au Mexique, en Inde, en Chine, où vous voulez, mais pas en France. Les américains tiennent le monde de la pétrochimie. Si vous voulez que la France soit privée de carburant, touchez donc à leur huile, et vous allez voir leur réaction. » Je continue donc seul mon petit bonhomme de chemin. Parfois je fais un plateau télé, mais…un seul par chaine. Jamais plus. Dès que certains actionnaires de la chaine s’aperçoivent que je suis passé, je suis ensuite persona non grata. Chez Autoplus, un journaliste du magazine m’a dit : « Je ne peux pas parler de votre produit, nous n’aurions plus aucun annonceur ! A moins que vous ne possédiez les milliers d’euros qu’ils nous donnent et qui nous font vivre… ».
Et zut, ce n’est pas le cas. Tant pis, on sauvera la planète un autre jour, le jour où l’huile américaine ne tiendra pas le monde…cherchez l’huile, et vous trouverez les lobbies.
J’ai d’ailleurs entendu dire qu’une éolienne contenait à elle seule près de 600 litres d’huile. C’est sûr, ils ne viennent pas chez nous par hasard.
Propos recueillis par Sioux Berger
En pièce jointe : le courrier du ministre de l’écologie en 1994, Michel Barnier